Fin du thermique en 2035 : un objectif trop ambitieux ?

Vous le savez peut-être déjà : l’Europe, après plusieurs rebondissements, a légiféré en mars 2023 la fin de la vente des moteurs thermiques à l’horizon 2035. Prévoyant une clause de réexamen en 2026, le Parlement Européen s’est laissé une marge de manœuvre pour revoir une partie ou l’entièreté de cette loi. Et si cette règlementation était revue avant ? Est-ce que les constructeurs sont optimistes ? Vous trouverez ci-dessous des éléments de réponse.

    Des enjeux de règlementation majeurs.

    Présentée comme une décision historique, l’accord des pays européens en faveur de l’interdiction de la vente des véhicules thermiques avait, en mars 2023, fait beaucoup de bruit. Avec les élections européennes prévues en juin 2024, de nombreuses rumeurs font état d’un revirement de groupes parlementaires sur cette question : le PPE, Parti Politique Européen, et première force européenne avec 176 sièges, compterait prendre position contre toutes les interdictions, dont celle concernant les véhicules thermiques. Attention toutefois, pour l’instant, il ne s’agit que de rumeurs et il semblerait qu’une petite partie du groupe seulement soit concernée. Avant de s’alarmer, donc, il convient d’attendre le programme officiel du PPE, qui devrait arriver prochainement, le début de la campagne officielle devant avoir lieu à partir du 27 mai 2024. Pour le moment, au niveau du parlement en tout cas, l’interdiction de vendre des véhicules thermiques n’est pas compromise.

    Au niveau des pays, si la suppression des incitations fiscales n’encouragent pas à l’optimiste, elle ne remet pas non plus en cause la mise en œuvre de cette mesure. L’enjeu se situe plutôt dans la capacité des entreprises et des particuliers à adopter cette nouvelle motorisation, qui reste pour le moment plus onéreuse que les véhicules thermiques. L’arrêt des subventions de l’Etat en Allemagne en décembre dernier, par exemple, a provoqué une baisse de 12,6% en février puis de 28,9% en mars. Une chute énorme sur un marché représentant 12%. Dans ces conditions, et s’il est légitime de considérer qu’il est dangereux de mettre en place un marché basé sur des subventions, la seule solution est de compter sur une baisse des prix de la part des constructeurs.         

    Où les constructeurs se situent-ils ?

    Côté constructeurs, le discours est plus nuancé : si la question ne se pose pas de savoir s’il faut conserver cette interdiction, elle intervient plutôt au niveau du délai de mise en application de celle-ci. Le directeur de l’Association des Constructeurs Européens d’Automobile (ACEA), Luca de Meo, par ailleurs PDG du groupe Renault, a été très clair sur le sujet lors du salon de Genève le 26 février 2024  :  « l'association des constructeurs automobiles européens n'a pas l'intention de contester la décision européenne d'interdire les moteurs thermiques en 2035 quel que soit le résultat des prochaines élections au Parlement européen », rappelant, toutefois, « qu’il faut que les conditions adéquates soient mises en place ». Une position partagée par Carlos Tavarès, qui prône également un report et à « sortir d’une position dogmatique », et d’autres constructeurs qui redessinent leur plan initial d’électrification.

    Si cette déclaration et la tendance qui semble se dessiner n’excluent pas de fait une nouvelle baisse des prix, après les efforts consentis lors de la mise en place du score environnemental, elles semblent néanmoins souligner que les constructeurs européens attendent davantage de soutien des gouvernements et, peut-être, du parlement européen. Statut quo, donc, en attendant que l’une ou l’autre des parties ne fasse un pas. Ou en attendant un engouement chez les consommateurs qui semble tarder à venir.  

    Malgré certaines informations non confirmées et des déclarations qui semblent remettre en cause l’interdiction de la vente des thermiques en 2035, il est important de retenir que pour le moment rien ne permet d’affirmer avec certitude que cette mesure sera abandonnée. La clause de réexamen en 2026 permettra d’y voir plus clair, avec peut-être une révision de la date de mise en application ou des conditions plus favorables à son adoption.